La cuisine était emplie d'un épais nuage aux senteurs tropicales, des oignons, des tomates frémissaient dans une poêle, et le poisson donnait en grillant sur la plancha un air de picnic improvisé sur une plage du Pacifique. Maricris avait de nouveau échoué ici, sur la 174ème rue, et elle comptait pour la millième fois ses valises dans le salon de sa tante. C'est alors que le téléphone retentit. "Crissita, c'est pour toi". Au bout du fil, une voix étrange et familière.
- Maricris, où est ma valise ?
- Saïf? Mais où es-tu? De quoi parles-tu?
- Ma valise. Il n'y a pas de prince russe. C'est moi, c'est ma valise.
- Comment sais tu pour le prince ? Et puis où étais tu tout ce temps, pour mon anniversaire ? J'en ai marre, Saïf, et j'ai bien réfléchi : c'est fini entre nous, pour un moment, on doit faire un break.
- Maricris, il me faut cette valise, elle m'appartient, je dois veiller sur elle comme une oeuvre d'art. Elle doit me revenir, reste où tu es, je vais essayer de venir à New York. C'est elle que je cherchais et qui m'a empêché de venir à temps te retrouver à Budva. Je suis désolé mais attends moi, j'arrive.
- Inutile, je n'ai plus cette valise.
- Quoi?!
- Je ne l'ai plus, elle à dû se perdre à une escale, ou bien...
- Quoi?!
- Je ne l'ai plus, elle à dû se perdre à une escale, ou bien...
- Ton vol?
- Malev, via Budapest et Milan.
- Maricris, écoute-moi...
- Laisse-moi, Saïf, je ne veux plus t'entendre (mais elle pensa : je ne veux plus jamais t'entendre, abandonnant ainsi son idée initiale qui était de breaker).
Et sur ce, elle raccrocha. C'est alors qu'elle entendit sa tante, comme au bon vieux temps, l'appeler d'un long et joyeux "Criiiisita, c'est seeerviii!". Elle n'avait plus qu'à suivre le parfum du sudado pour entamer une nouvelle ère, laissant son ex au placard des souvenirs comme on range un vieux CD de hip-hop dans un carton qui ne s'ouvrira plus que par accident. Boogie down, Miss Rubio, qui garda pour le dessert les fruits du hasard, qu'ils soient sortis, ou non, du fond d'un placard.
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