jeudi 28 juillet 2011

Transition (au fait, tu sais ce que tu vas faire ?)

-Le père : au fait tu sais ce que tu vas faire? 
-Le fils : non c'est encore trop tôt, il faut attendre de voir ce qu'il est possible de faire.
-Le père : mais tu dois bien avoir une idée quand même ...
-Le fils : oui, je travaille sur quelques pistes
-Le père : Lesquelles?
-Le fils : par exemple entraîner les taïkonautes à la survie interculturelle au cas où ils retomberaient au milieu de l'Afrique Noire ou de la cordillère des Andes, ou autre option lancer la ligue internationale de défense des défenses d'éléphants en y impliquant une grande star hollywoodienne (je suis en contact avec Eva Mendes, enfin avec un gars qui bosse pour les studios de Luc Besson et qui lui connaît untel qui connaît son agent, bref Eva elle va m'aider) ou bien alors si ça prend l'eau je pense à faire Magicien à Macao, il existe une école inconnue où je peux apprendre tous les trucs et les tours de passe-passe en un temps record, d'ailleurs là je dois prendre l'avion et fuir ces gaz mortels, ah si je pouvais les changer en parfum de rose, bon je te laisse Macao m'attend ,je te raconterai...

Le père le regarda prendre son sac et partir avec un bref au revoir, se demandant comment il pouvait se sentir à ce point éloigné de son propre fils qu'il considérait comme fou (comment peut-il penser à de tels projets? et pis, comment peut-il croire les réaliser? Il ne parle pas chinois, je ne crois pas avoir noté chez lui un intérêt quelconque ou au moins suffisamment soutenu pour l'astronomie, connaîtrait-il encore les animaux sauvages aussi bien que moi qui ai parcouru toutes les réserves de la Zambie à la Namibie....) tout en se disant qu'il ressentait une pointe d'admiration ou de fierté, aussitôt balayée par le seul jugement qui pouvait bien le rassurer dans ce qu'il lui restait d'autorité : "non, il n y arrivera pas et je vais lui démontrer pourquoi". Sur ce, il pensa immédiatement qu'il était urgent d'aller nettoyer le monospace maintenant s'il ne voulait pas arriver trop tard à la boulangerie. S'il était en retard une nouvelle fois sa femme ne lui pardonnerait pas.

Le fils, lui, avait voulu partir vite, sachant que son père ne comprenait jamais rien à sa démarche, pourtant somme toute logique avec le personnage : voyager, rêver, rire, sourire, donner une perspective hors de l'immense rouleau du  métro-boulot-dodo qui t'entraîne à devenir triste, casanier, et à économiser toujours quelques centimes de plus pour ce pavillon de merde que tu crois être l'aboutissement ultime d'une vie où tu as courbé l'échine sans jamais te poser la seule et unique question qui vaille sur cette putain de planète : comment être moi? Je suis surfeur!, avait-il crié intérieurement et ce rouleau, je vais le dompter et en faire une figure artistique que les juges sans repère essaieront vainement de noter. Sans aucun doute, la liberté était un virus qu'il voulait transmettre et en ce moment il avait besoin d'un rappel. Il avait bien essayé de motiver ses parents à voir les choses autrement, à briser sans cesse les chaînes de leur passé pour voir que devant il y avait du neuf, nécessairement inconnu, mais c'était peine perdu voire couru d'avance car pour croire un fou, il faudrait être fou soi-même.

mercredi 27 juillet 2011

A Morieux, les sangliers partent avant d'être vieux

Le sanglier a dit
je me casse
à marée basse
les Côtes-d'Armor
c'est trop la mort
plus de chasse
c'est la classe
mais pour midi
je manque de
champis
et ça dure
depuis Mur-
de-Bretagne
ma forêt
toute plate
de l'Argoat
alors
comme on dit
faut bien
bouffer
et puis
les algues
vertes ou
roses
je m'en tape
c'est pas si
mauvais
n'est-ce-pas
ma petite laie?
Tiens prends-en
pour les enfants
on sait jamais
dès fois que
ces empotés
nous réclament
leur goûter
ah puis
s'il-te-plaît
dépêche-toi
j'ai pas
envie de trainer
dans le coin
y a déjà eu
la météorite
au petit matin
et puis
maintenant
si on n'a pas de chance
les touristes
en Guy Cotten
ils te balancent
et l'autre
en Armor-Lux
il me colle toujours
au cul
je sais pas
ce qu'il a
mais ça me gave
désolé de te mettre la pression
mais tu vois le camion
au bout de la jetée
il est là pour tout
ramasser
alors grouille
si tu veux pas y laisser
ta dépouille
profiter un peu de ta souille
et jouer avec les petits
sans finir en rôti!

Les deux sangliers
se jetèrent alors sur les algues,
et pris d'un malaise
ils s'allongèrent
mari et femme
groin contre groin
ils eurent certainement
une pensée pour leurs petits
marcassins
avant qu'une vague
ridicule
ne vienne finalement
mourir
sur leurs flancs
refroidis.

Plus:



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mardi 26 juillet 2011

A Port-Harcourt, on veut faire court

Le pic pétrolier
est depuis
longtemps
dépassé
il faut plier
les derricks
et rentrer
au port
extraire
de la
tireuse
assez
d'alcool
pour
rendre
ces
ladies
folles :
à genoux
demoiselles
félicitez
les guerriers
qui ont
amassé
assez d'argent
pour se
rêver
télécommande
en main
défiler
sur
les Champs!

Armani
baguouses
en or
on veut
se croire
Européen.

Pour la lecture
au Nigéria
nous avons
nos clubs
donc
"ça doit servir"
pour la luxure
aussi
nous avons
nos clubs
et confidences
pour confidences
"ça doit les asservir"
ainsi
pour être riche
et vite
je m'adresse
à toi
directement
soupirante
du rêve
nigérian :

pour te
promener
et faire ta belle l'été
à Saint-Germain des prés
enfile cette guêpière
ce masque blanc
parfume toi au
Kerosene
de Christian
Mort
après
quand tu es prête
finis ton milk-shake
pose le sur le zinc
et rejoins-moi
au bout du bar
pour la trinque
de ce vin
de palme
made in
Friday
ou
l'insolente
réussite
du petit
gamin
de la
multinationale
disparue.

Plus :
http://www.thetidenewsonline.com/?p=26496


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dimanche 24 juillet 2011

A Brasilia, on erre à la recherche de soi

Tu ne m'as pas vu à Brasilia
marcher le long du périphérique,
plein de bonnes volontés,
arpentant de nouveau les abords
d'une ville en B?

J'étais là
sans autre but
que de traverser
une fois pour toute
le plateau semi-aride
du Goias.

Tu ne m'as pas vu à Brasilia
prophétiser
sous les septs pyramides géantes
et les tatous saoûlés
à la caipirinha
                             - qu'ils étaient drôles! -
que le renouveau
est enfin proche?

Non?

Tu ne m'as pas vu à Brasilia
accélerer le coucher du soleil
pour rêver
avec les fonctionnaires
que les choses tournent rond
dans les cuadras?

On en a dit des mots,
on a même réclamé
un dictionnaire
mais le patron
n'était pas un
littéraire.

Tu ne m'as pas vu à Brasilia
                                             justement
conjuguer le verbe
attendre
sous l'abribus tropical
lavé par une pluie chaude,
l'orage qui tonne
et le bruit des klaxons?

Non! Vraiment ?

Tu ne m'as pas vu à Brasilia
me brûler les yeux
au cyber-café
dans l'espoir d'un mail
et d'une rédemption
virtuelle ?

J'ai pourtant
usé
tous les claviers.

Tu ne m'as pas vu à Brasilia
fêter l'anniversaire
du plus que
                          centenaire
Oscar Niemeyer ?

C'est bien dommage, décidément !

Car je lui ai offert
                         un verre
                                           un compas
                                                            une équerre
et devant moi
                        il dessina
la nouvelle
Brasilia,
celle
qui
                                 transformera
nos déserts intérieurs
nos ruelles de doutes
                                        en capitale
                                                 dont la route principale
                                                                       chemine
                                                                                         fière,
                                                                                                    belle,
                                                                                                             son bitume
                                                                                                             encore inondé
                                                                                                             de soleil.

Plus :
http://boomer-cafe.net/version2/index.php/Architecture-des-annees-50/Brasilia-capitale-au-milieu-de-nulle-part.html


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jeudi 21 juillet 2011

A Breda, on fait du yoga

Allez-y
installez vos caméras
de surveillance,
car la chance
ne vous servira
pas
pour me rattraper
quand je file
ainsi
par dessus
vos radars
tel
un clochard
radieux
dépassant
la foule
des
connards
à la vitesse
de la lumière.

Tous les go-fast
me courent
après
sans
succès
car je serai
le premier
à Bréda
pour tirer
leur coco
promise
et la mettre
dans la lessive
de vos
draps.

Rangez uzis
fusils
armes de toutes
catégories
il n y aura
pas de
compromis

Breda :
j'ai rendez vous avec une maîtresse
yoga.

Oui, Breda, Hollande
la ville du Mentos
et des fournisseurs
de la bande
de Creil.

Sous le toit
de Dorinda
j'apprends
la connaissance
de Soi
l'harmonie
vers le
nirvana
la posture du
lotus enchaîné
du serpent
de l'angle
serré.

C'est une escale
dans les hautes
herbes
de Breda
transit
de hash
sous les
moustaches
de la police
croient-ils
faire des
merveilles,
la bande
de Creil?

Maître de
Soi à Breda
c'est pour moi
une formalité
de faire échouer
dealers
et
policiers.

Débarque
du Dam
le plus proche
Embarque
la cam
dans mes poches
Depuis ma barque
arrose de napalm
les marais
infestés
rien ne cloche.

C'est une nature
morte
de Van Gogh
tulipes et tournesols
ne passeront
pas la porte
tous les dégâts
seront signés
"Maître
Yoga"

Plus:
http://www.iamexpat.nl/read-and-discuss/lifestyle/interviews/interview-with-dorinda-farver


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mardi 19 juillet 2011

A Odessa, camera !

Un week-end
en Ukraine
bord de mer noire
les films s'enchaînent

Bienvenue au
festival
international
du film d'Odessa !

Alex Shapiro
mon pote l'ex-acteur
porno
présente son nouveau film:
porno.

une ado
perruque
rouge
rubis
coupe de champagne
tombée du lit
embrasse
                     langoureusement
sa voisine
elle appuie
                     longuement
ses doigts
sur la nuque
de la
blonde
                  platine
au loin
on entend :

action !

Odessa est une
ville
mythique
Pouchkine a lu
le messager d'Europe
méridionale
ce journal de l'élite
politique
il a aimé cette ville
aussi
française que
russe
mais il n'a pas vu
les pauses lascives
de la bimbo
sur la plage de
béton :
faut-il pour
autant
regretter
Louis
Vuitton ?

Ville de mutins
Odessa
exalte
le machisme
marin
me voici sur
le cuirassé
Potemkine
Macha
se teint
les ongles
bleu
blanc
rouge
mais
Shapiro
la rappelle
illico

Où se croit-elle:
dans une pub Chanel?
Mieux que cela
elle est à Odessa.

Mais comme partout
quand le boulot
reprend
moi c'est
la bohème qui
me reprend
le tramway
s'en allant...

Je quitte
donc
l'armée
sexuelle
de mon ami
Shapi
et me retire
sous
des paroles
simples
qui ressemblent
à celles-ci

"les filles
je m'en vais
les mecs
je m'enfuis
bombarder
de mes vers
les murs
de toutes
les cités
les rondes
et les
carrés".

Plus:
http://www.oiff.com.ua/en/programma.htm?section=19


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lundi 18 juillet 2011

A la Havane, on se soigne

La Havane, au sortir
de la période spéciale
qui a vu entrer
le capitalisme
dans la Révolution.

Champs de cannes
à sucre
                                                 éthanol
maison coloniale
                                                   complexe
                                                             hôtelier
les vagues
frappent la
jetée,
éclaboussant
de tout leur
grain
les familles
déchirées.

Mais l'Homme nouveau
est arrivé.

Sans tirage
au sort
                      sans aventure
                      clandestine,
il s'est posé
                      en Iliouchine
sur la piste
détrempée

on l’accueille
sans acclamations
puis on lui raconte
ce proverbe cubain :
"l'éléphant a 4 pattes
et une mémoire qui
t'écrase"

Ses pieds sont bien
au sol
mais l'Homme nouveau
est étourdi;
un certain alcool
le frappe alors
aux tempes:
serait-ce cet ignoble
saké chinois
frelaté ?

Pendant ce temps
où il vacille
un nuage noir se réfléchit
dans les flaques
du tarmac

même si le douanier
clément
lui rend
son passeport
il n'est pas interdit
de se demander si
l'Homme nouveau ne
serait pas
                                         une escroquerie?

En tout cas il est arrivé
- on le sait désormais -
non pour se faire soigner
ni pour être
                        alphabétisé
il est arrivé
                              en pionnier !
dans un appartement meublé
ayant appartenu au Che.

Tour de contrôle,
                           reprend du service !
                                                             et rend la vérité
                                                             à celui qui la cherche :
                                                                                                 L'Homme nouveau
                                                                                                 rêve d'être lui.

Il est environ 4h30
à peu près au milieu
de la nuit
lorsque je me
réveille, le cerveau lavé
au Rhum
arrangé.

L'autocritique est
acide
comme le citron
il me faut du sucre !

Dehors
les néons grésillent
la chaleur m'écrase
et me réduit
je dois absolument
me reconstruire

pas un bruit
les enfants de l'école primaire
dorment
leurs parents sont fidèles
                                            ils dorment à côté
                                            pendant que les prostituées
tapinent en silence.

Heureusement
les lumières
en clignotant
ouvrent la possibilité
d'assembler
                           progressivement
les quelques lettres
écrites au plafond.

Le message vient à moi,
je suis sauvé.

Débarrassé
de mon costume
de l'Homme nouveau,
                                        nu
                                                   et vierge de tout passé
je construis alors
le puzzle rédigé
dans la maison
du Che:

"Il faut vivre comme les Grecs :
 manger simplement et penser à de grandes choses"

la nouvelle
étape
ne fait que
commencer.

Plus:
http://www.rue89.com/2007/10/06/le-rideau-de-sucre-une-generation-heureuse-a-cuba


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jeudi 14 juillet 2011

A Canton, je paie la rançon

Je ! Je ! Je !
Fallait il trop le crier
pour se faire enfermer ?

On ! On ! On!
les rimes vont tomber
du camion
attention !

Gardez-vous de tout
décompte
lisez plutôt
ce que je conte

Kharbine offre
à la Chine
comme
Alain Delon
offre au Japon

une part de son
anatomie

Pékin - compte-rendu pas très puritain
Je compte : il y a vingt putains, un devin et Dominique de Villepin, ils se saoulent à tous les vins, ça va en faire pleins de potins et parce que je suis à Pekin, j'en profite pour m'acheter un pot de thym que je mettrai dehors à l'entrée du jardin ça fera fuir les vilains, les pingouins et tous ceux qui pensent que ma poésie marche au vilebrequin!

Shanghai - activités pour la marmaille :
1) chercher des bonsaïs dans les bottes de pailles
2) sans pagaille cuire du riz et tailler la volaille pour la ripaille
3) une médaille pour ceux qui ramènent un bout de muraille
4) réciter l'alphabet braille dans tous ses détails
Chers amis businessmen vous devez être sans faille, car il est hors de question de ne pas faire de maille quand on grandit à Shanghai!

Canton - c'est toujours bon le jambon mon bichon
- Quelle cuisson préfère le colon pour ses cornes de bison à la sauce de Canton ?
- Je m'en fous, qu'il répond, pourvu que tu prennes ce cochon à saute-mouton
- Quoi, je suis cook pour de bon, et je fais pas dans la façon de funèbres oraisons
- Cook, t'es con comme marmiton, laisses-béton, fais-le à fond où je te passe à savon
- OK Patron, j'en ferai de la chaire à canon!
- et moi je t'accrocherai au mousqueton.

Docteur Shan
instantanément
                             reprend
mon cahier

bon travail
qu'il dit

lettré
en carton-pâte
à la moumoute
peroxydée

main dans la poche

vibration du trousseau de clés                           

Sa Majesté qui louche
ce soir
me libère
sous caution

finit l’humiliation
des rimes
sous pression

Vite : reprendre sa Liberté

VTFF Shan
et je te pique
une tuile
de Mah-Jong
pour raconter
cette
vanne
à la Havane!

mercredi 13 juillet 2011

A Backspool, verre à la main je plonge vers mon destin

Je déguste verticalement l'horizon
au passage à niveau
salue le garde-barrière, un pochtron
qui fait son signe de croix
en sifflant sa chopine de merlot.

Il est connu pour tout rafler
un puit sans fond
                              doublé d'un avare
                                                            près de son pourboire
paraît qu'il est tombé dans un tonneau
et que faut pas lui parler
des petits nouveaux,
ni de gagner au loto.

La ville n'est plus très loin
sur les coteaux
comme autrefois Jésuites et Augustins
j'ai le gosier sec
en traversant l'insipide banlieue
sans train,
                         sans raisin,
                                                 sans rien à picole, vieux !

Mais Backspool est là
derrière les épis de blé
et le bitume
lacéré
par les pneus
caoutchoutés.

Las, je me fais doubler
par une gitane
au pas pressé
                                                          mouvement de robe grenade
ça sent la fleur d'oranger
et les jeux de hasard;

de son sac volent trois
cartes
que je ramasse.

Enfin, la vallée de la Spool:
une collection de tranchées
où coule le rosé
du matin.

La ville se signale à son entrée
par un virage plongeant
dans les notes balsamiques
d'où partent
les téléphériques
menant à son centre.

Je saute dans le mien :
il a le vert optimiste
et sur le côté
un point rouge décidé -
croque une pomme
et en voiture Simone !

Pas besoin
d'effeuiller beaucoup la cité
pour qu'elle se découvre.

De ma cabine je vois :

- une barrière montagneuse qui retient la lie et les trouillards, la ville s'assurant ainsi la visite de citoyens courageux et policés (sous vos applaudissements);
- une grappe de maisons cylindriques, sans doute pour mieux cuver les lendemains de fêtes c'est à dire chaque jour depuis la nuit des temps;
- à mi-parcours l'hospice, dont les créatures sculptées à l'extrémité des poutres observent la file des patients;
- sur ma gauche un mur végétal couvert de vignes en espaliers, où s'affrontent deux joueurs d'une pelote vaguement basque - l'un d'eux claque un joli coup, une demoiselle située plus haut dans les gradins lui montre sa jambe - sans doute la promesse d'une récompense...

Soudain, un vol de papillons
                                                quittant
                                                                           brusquement
les jardins
                  flottants.

Les fastes sont aux préparatifs
                                                                                         apparemment
ça tambourine au vent des Andes
et je repense déjà qu'il est temps
de boire
ce qui est en bas;

Pauvre du Sichuan, rembobine ton dictaphone
nous sommes loin de ta Chine
et le poète a soif !

mardi 12 juillet 2011

A Port-Videmal, on vit toujours un moment spécial

Je dois prendre le radeau
pour laisser mon fardeau

Je dois prendre l'optimiste
pour noyer le psychanalyste

Je dois prendre le U-boot
pour échapper à mes hôtes

Je dois prendre le tanker
pour me ravitailler en vers 

Je dois prendre le multicoque
pour ralentir notre époque 

Je dois prendre la vedette militaire
pour combattre tous les enfers

Je dois prendre le sampan
pour caboter tranquillement

Je dois prendre le brise-glace
pour me regarder en face

Je dois prendre le grumier
pour caresser le bois mouillé

Je dois prendre le kayak
pour éviter le bac

Je dois prendre la barquette
pour aller à la fête

Je dois prendre la jonque
pour embrasser quiconque

Je dois prendre le drakkar
pour transporter mes espoirs

Je dois prendre la péniche
pour retrouver l'hémistiche

Je dois prendre le Liberty ship
pour saluer ma vieille équipe

Je dois prendre la chaloupe
pour convoyer le vent en poupe

Je dois prendre le quatre-mâts
pour tomber dans tes bras

mais la vie est ainsi faîte
que je regarde
par la fenêtre

couler mon île

attaché au quotidien

pas si mal

de Port-Videmal.

dimanche 10 juillet 2011

A Moskinte, on vit sans contrainte (car on sait que c'est perdu)

Les néons clignotent
à l'entrée de la grande
Pagode
"COME HERE"
comme sur tous les bâtiments
de la rue Ipod

Devant moi, dix colonnes
de dragons
crachent de la vodka
purifiée par les chimistes
de l'oblast.

Mendeleïev est mon caviste :
impossible de dire "non"
à l'absolu pardon.

Combien d'années de solitude
pour arriver dans cette jungle ?

10?

20?

30?

des milliers ?

et puis pourquoi compter?

De toute façon,
les dés ne roulent plus
sur le tapis vert
il faut se laisser
                              porter

car celui qui vient à Moskinte
sait d'avance
que c'est perdu

et peut maintenant
jouir
sans retenue.

La mosaique au sol
retrace
mes années sans
fric
ah ah !
et mes voyages
en aviron
passant
sous les portes
cochères
accompagné
de mes dames de nages
heureuses
de cette vie
en jachère...

Moskinte c'est aussi :
une case en construction
dominant la plaine
quasi-africaine;
                                   un cirque carré
                                   où les acteurs
                                   jouent allongés;
                                                                 un cinéma arte povera
                                                                 où la lumière ne s'éteint
                                                                 pas;
et quelques merveilles
comme le sambadrome
où tous les danseurs
du monde
-et Dieu sait s'ils sont nombreux !-
viennent chercher
leur cendrillon

Chaque fois qu'ils la trouvent
le maire,
déjà plus que centenaire,
                                       met en branle,
                                       d'un simple clic
                                                               son Jésus mécanique :
la marionnette géante
en acier trempé
dans le nectar
des tropiques
délivre alors
ses messages
bibliques :
"Si vous saviez
quel bonheur
vous attend !"

Moskinte,
antichambre
du paradis,
laisse
s'accoupler
le flot
des réfugiés.

vendredi 8 juillet 2011

A Canton, point d'abandon

Je découvre
en grattant
la poussière
de ma cellule
que d'autres
poètes ont
payé de leur
                            folie
leur séjour
ici

Le cafard
en miette
gît
dans mon assiette

plus personne
n'est passé
depuis un siècle

on doit m'apporter
un cahier
et un stylo
pour écrire

mais ils ne viennent
pas


ni le cahier



ni le stylo



ni personne



pourtant
j'écrirais
n'importe quoi


d'ennui

je lis donc
ces mots gravés
à la suie

la folie
je vous dis

"Quand on est on rit"

"Shan est à l'Alliance - ce n'est pas une bague"

"Rime interdite sous peine de sévices : ping-pong avec hutong"

enfin,

"Sois fou : sauve-toi !"

Moi le poète
élastique

je suis désormais
sans ressort
politique
ni même
                               comique

je suis sans
autre ville
que celles
                     imaginaires

sont-elles
plus belles
que les réelles?

mon esprit
parviendra-t-il
à les saisir ?

Donnez-moi
les
clés
de la fuite
contrôlée...

jeudi 7 juillet 2011

A Canton, en prison

"Opération diaporama"
je pourris dans ma cellule
avec pour seule lecture
un Télérama

contre un exemplaire
de Mémoires d'un ingenieur
d'affaires
mon géolier a accepté
de faire passer ce mot

les caciques chinois
sont aux mains
d'un diabolique
chef d'orchestre :
un docteur
en stylistique,
un Français,
je ne l'ai pas vu
mais il paraît
qu'il a la raie
du côté perdu

La condition humaine
ici dans le delta
n'est pas pour
réveiller
les sens du poète

Il faut deviner
les vapeurs
de ciboulettes
sous la couche
de friture
aux fruits
de mer

Je suis enchaîné
on veut me
faire bouffer
des pénis de renne
séchés
on veut me plonger
tout nu
dans le Yangtsé.

Pour me punir
de ne jamais
écrire
la gloire éternelle
de l'empire
du Milieu
je suis condamné
à rendre chaque
jour une liste
de rimes
rarissimes
qui plaira
               ou pas
au parti
et à notre ami
le littérateur

je voudrais
frénétiquement
vous embrasser
mais je vais bien
je suis bien traité

Ils m'ont filé
un Sollers
au déjeuner
s'ils savaient!

mais pour ma
rééducation
ce sont les travaux
forcés

Dans ma piaule
humide
et sans cesse
éclairée
je dois
produire
pour en sortir
une série de rimes
                             toujours les rimes
                                                          encore les rimes
sur chaque ville
de Chine
cela lavera
mon crime
d'avoir oublié
le Cercle
délaissé
"un milliard
de poètes"

alors j'écris
pour rendre
ma copie
au Docteur
Shan
comme ils
-les Chinois-
appellent
ce Français
voulant laver
ma cervelle.

(ce bouffon
a fait la Sorbonne
mais s'est arrêté
à Maubert
c'est là qu'il a
rencontré
le livreur de Dim Sum
qui lui a tout
appris
d'où Canton, puis
le latex,
et peut-être
encore
Philippe
Sollers)

Plus :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Philippe_Sollers


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mercredi 6 juillet 2011

Transition (l'enlèvement du poète)

Aéroport international Rafic Hariri
J'allais m'envoler sans passer la douane
quand je sentis dans mon dos
la main du gorille

La Direction générale de la répression
des fautes d'orthographe et de la rime
forcée ?

Le Front de libération du maussade ?

Les miliciens patriotes
du français de Moussa?

Que sais-je encore ?

J'étais donc suivi...
mais il est déjà
trop tard

En berline
noire
je remarque
un brassard

deux-trois
idéogrammes
une cagoule
aveugle

confinement
odeur du latex
me voici
jouet
érotique?

pas très rassurant
vu la testostérone
de l'enlèvement

heureusement
une voix claire

elle annonce
mon transfert

je ne dois plus voir

elle énonce
la charge

"Déni de poésie
à l'encontre
de la République
populaire"

Pas de quoi
plaisanter
je viens d'être
enlevé

par le cercle
des poètes
chinois
disparus!

mardi 5 juillet 2011

A Beyrouth, sur la route

Rose à lèvre pour la petite
café-viagra pour le papa
maman regarde
les défilés incessants
                               des Hell's angels
                                                          version Liban
                                                         
15H30 sur la corniche
une bande de neige
deux bandes de sang
non ce n'est pas
l'Autriche, mon enfant

Aucun doute, alo! kifak?
Bienvenue à Beyrouth !

Cèdres de Phénicie
nèfles et autres fruits
je rêve
                        non je vois
la Mercedes
jaune,
Mohammed
le dandy
et les molécules
d'été qui
s'échappent
dans le bruit

J'y pense :
moi aussi
j'aimerais bien
être immatriculé
à Liberté!

Au camp palestinien
pas question de dire
comme le nutritionniste
de la rue de Damas
-j'y suis allé
trop de loukoum
enfin je
passe-
que le kaki est riche
                                  en béta-carotène
                      car ici on aime
les régimes
                      fortifiants
plus que les
détoxifiants

deux salves
de Kalach
le Fatah ou le Hamas ?

Garde du corps,
un effort

Retour au centre
chambre pas rangée
désordre
accumulé
" c'est Beyrouth !"
comme disait ma maman
brosse mes dents
sors
sirote un peu d'Orient
dépasse les chantiers
en avalant quelques mezze

Je vais chanter
près de Nasser - vite
"That's the way I laïque it" !

Plus:
http://www.iloubnan.info/politique/reportage/id/1083/titre/Laique-Pride:-des-Libanais-fiers-d'%C3%AAtre-citoyens


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lundi 4 juillet 2011

A Abidjan, on s'entretient puis on s'entretue

Le ciel est une brique rouge
qui commence
dans le dos du griot
où termine t-il  ?

Abidjan à travers les yeux d'un
bandit
Son chef :
"C'est toi qui paieras
1500 FCFA
si tu pisses sur le mur
des villas
ou sur celui
de la SOLIBRA
les règles ne changent pas
Fils, j'ajoute et là c'est bon pour toi:
impunité si tu as tué
comme pour le Probo Koala
les règles ne changent pas"

Tristes lagunes
où est la perle
qui dansait
rue de la Princesse?

Le bandit répond,
flag à la main
treillis salis par
l'huile de vidange :
"Quoi ? mais ce n'est pas juste
Chef,
qui a peint le sigle BMW sur la porte
de ton garage : Gbagbo ou Ouattara?
qui a monté les amortisseurs dédouanés
sur ton taxi-compteur, alors que ton affaire
ne roulait pas?
qui a sauvé ta go du maquis,
quand tu n'étais pas là ?
Gbagbo ou Ouattara ?
Non c'est moi!
aussi je compte bien faire la loi
maintenant
ici
chez moi!"

Dans les ruines de la cité rouge
des claviers d'ordinateurs
flottent dans le sang
Cocody ne voit plus
un étudiant

"Fils, retiens-toi
tu es plus frêle que le
margouillat
ton orgueil
n'existe pas
tu ne vaux pas un enfant
soldat
tu fais celui qui n'a pas peur
du couteau
exactement
comme le cabri mort!
Un conseil :
tiens-toi à carreau

je te multiplie
par zéro !"

Coulent les rivières d'acide
les yeux voient et
la bouche ne parle pas
on glisse
sur la patinoire
de larmes,
Hôtel Ivoire

"Qui es tu pour oser me menacer
comme ça ?
Donne-moi à boire
que je pisse sur les murs
et sur ton taxi
de malheur
aucune amende
aucune règle
pour le nouveau
Roi !"

Une machette aiguisée
contre les défenses
de l'éléphant
sort du fourreau
de l'adjudant

"Ironie du sort,
tu es mort !"

Le couper-décaler
du DJ d'à-côté
couvre le son strident
                                                un cri
                                                            lent...
l'attiéké
l'odeur du sang
non séché
d'Abidjan.

Plus:
http://www.fratmat.info/
http://news.abidjan.net/h/402726.html


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vendredi 1 juillet 2011

A Malaga, on tombe amoureux (une fois)

Elle lui fait face
mais au lieu de baisser
la tête
l'éblouit de grâce

Malaga
même le torero
en perd son pyjama
ses deux oreilles
l'envie de
se blesser
                                                     une fois
et de recommencer
pareil
pour qu'on lui reconnaisse
sa bravoure.

Il a devant lui
ce jaune
et ce rouge
qui luttent pour contrôler
une beauté bien trop libre
                                                pour être admirée
                                                                                 comme ça

Il croit entendre
comme dans l'arène
reprends tes appuis, hombre!
Il se ressaisit

Le bleu ciel
et les reflets verts
qui teintent les cheveux
de la belle Malagueña
donnent un peu de répis
à notre valeureux guerrier

Il est pourtant déjà bien las,
                                       un genou à terre,
                                                                     touché par une fulgurante usure :
il est amoureux
et ce sera sa blessure.

Dehors, on fait n'importe quoi
on oblige les gens à rester
dans les piscines
pour ne plus la voir
les voitures s'entrechoquent
parce que les chauffeurs
imaginent
ses grands yeux noirs
et ses sourcils rendus
espagnols
par la force d'un trait
français.

Comment est-on arrivé là?

Est-il possible que la muse nous méduse tous,
à Malaga ?

Par quel miracle
résister au modèle
pour coucher son effort?

A cette question je répondrai
que le peintre était plus amoureux
encore
que notre artiste
matador.

Plus:
http://www.diariosur.es/local/malaga/
http://www2.museopicassomalaga.org/02_1frameset.htm


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